LES HYPOCRITES DE LA JUSTICE SOCIALE
SONT-ILS SI PEU NOMBREUX EN FRANCE ?


Qui sont-ils exactement ?







J'ai tenté de vous préparer ce petit traité de l'hypocrisie politique...


Quel est exactement un hypocrite de le justice sociale ? Il est vrai que cette appellation ne fait pas partie du vocabulaire politique conventionnel, ni du langage courant. Cependant j'ai trouvé qu'elle s'adaptait bien au caractère que je souhaitais décrire. Tentons donc de définir ce dont il sera discuté ici.




Un petit exposé illustré


Tel que plus généralement l'égoiste, l'hypocrite de la justice sociale est celui qui n'accorde pas sa façon de vivre et d'agir en fonction des principes qu'il affiche. Contrairement à ce qu'on pourrait croire il peut afficher l'un ou l'autre des deux types principaux de tendances politiques (gauche ou droite), mais rarement à l'extrême. (L'extrémiste est un autre cas que je ne prétend pas avantager dans cette discussion, mais qui n'est pas débattu ici). Souvent son hypocrisie n'est pas le résultat d'une action délibérée mais celui de l'ignorance ou de la paresse intellectuelle, voire même tout simplement de la bêtise. Il en résulte par la même occasion qu'il y a peu de cohérence entre ses différentes idées (s'il en a plusieurs) lorsqu'il discute de politique. Ceci peut donner la désagréable impression qu'il est volontairement de mauvaise foi mais en réalité, si ce n'est pas un politicien professionnel c'est simplement un idiot qui n'aime pas avoir tort. Peut-être déjà avez vous en tête des personnes que vous connaissez, ou peut-être que je vais vous agacer bientôt si vous continuez cette lecture. Cependant je ne puis m'en empêcher. . . On dira que c'est plus fort que moi !




Sans faire tout de suite de classification entre l'hypocrite de gauche et l'hypocrite de droite, on peut généralement remarquer que les deux pratiquent abondamment le double langage lorsqu'il s'agit de parler de ce qui les touche plus directement, puis des autres. On comprend facilement pourquoi différentes catégories socioprofessionnelles de niveaux d'éducation équivalents constituent chacune des groupes d'individus de tendances politiques radicalement opposées. Ici ne croyez pas que je dénigre les victimes de la "crise" qui ont déjà perdu leur emploi et leur avenir ! Il s'agira bien de parler de ceux qui font encore partie de la classe moyenne, bien en place, voire même peu inquiétés, et qui nous donnent soit des leçons de morale, soit le secret qui sauvera le pays. D'ailleurs, comme il en sera question à la fin, il est bon de remarquer que lorsque dans un pays la classe moyenne contient un nombre important d'hypocrites de la justice sociale, c'est qu'on y a vécu trop bien par le passé. (Ce qui ne veut pas dire que l'avenir sera radieux).




Par qui commencer ? Il faudra bien choisir. Puisque je ne suis pas de gauche (mais suis-je vraiment de droite au sens actuel), je vais être bon joueur et commencer par l'hypocrite de droite. Une des particularités de l'hypocrite de droite est que son hypocrisie est encouragée parfois par sa lâcheté. En effet depuis quelques années c'est assez honteux de s'affirmer clairement de droite, dans le cas où la question vient. (Mais c'est peut-être aussi à cause d'un manque de convictions fondées). C'est rarement le cas à gauche, où après cinq minutes de discussion sur un sujet quelconque avec un inconnu, celui-ci vous a déjà déballé toutes ses convictions politiques. Cela m'est encore arrivé aujourd'hui d'ailleurs ! Convictions hypocrites ou pas ? Nous y reviendrons plus tard. Mais revenons à notre hypocrite de droite, celui qui n'ose souvent s'affirmer clairement que lorsqu'il sait que c'est sans aucun risque, ou quand il est en forme et qu'il veut faire de la "provoc". Comme le veut la logique, il s'appuie souvent sur les conséquences calamiteuses (mais vraies, il faut le dire) du communisme pour justifier que toute forme de régulation, de droit du travail, de limitation du libre échange, voire même de protection sociale, sont des barrières socialo-communistes qui nous empêchent de prospérer. C'est ce qu'on appelle chez nous l'"ultralibéraliste". Jusqu'ici c'est de la simple exagération politicienne comme on en fait partout, mais c'est en entrant dans le détail que ça devient drôle, ou triste si on le prend trop au sérieux. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, dans le cas où il est un véritable hypocrite, notre libéraliste ne se démonte absolument pas quand il s'agit de considérer la dite "crise". Selon lui c'est une intempérie qu'il faut traverser. Il ne faut surtout rien changer, rien protéger, car c'est "la loi du marché". En effet, pour lui il serait inconcevable de penser qu'il puisse en exister une autre plus prioritaire, sinon on sombrerait obligatoirement dans le communisme. Selon lui par exemple le protectionnisme quel qu'il soit est une pratique honteusement socialiste, ce qui est la preuve de son ignorance de l'histoire. Selon lui l'assurance médicale privée non règlementée est la seule vraie solution juste, mais il est déjà chagriné lorsque sa prime d'assurance voiture augmente suite à un malheureux accrochage. Selon lui, si on se retrouve sans emploi il n'y a qu'à travailler. Selon lui, la crise est due au nombre trop bas d'heures travaillées par semaine si il est employeur, ou à une épreuve envoyée par le ciel si il est salarié, ainsi qu'à cette vilaine population qui a refusé de surconsommer dans les deux cas. Ces convictions ne l'empêcheront pas, si il est employeur au sein d'un certain type de PME ou autre structure équivalente, d'être absent un jour ouvré sur trois, toujours en vacances (bien sûr sont exclus ici les artisants et les travailleurs seuls indépendants), alors qu'il refuse périodiquement à ses employés la prise de congés en même temps que leurs familles. (Par la même occasion il pestera contre les RTT). Dès son retour de vacances ou de "déplacement professionnel chez un copain" (sic), tout en forme, après un petit discours en faveur de la suppression de la sécurité sociale, il racontera l'histoire de son fils qui avait une rhinopharingite, expliquant que c'était plus pratique d'aller aux urgences à l'hôpital pour ne pas avancer les frais médicaux. Lors du repas de midi, après avoir maudit un de ses clients qui revend ses produits en dessous du prix convenu (c'est pourtant la loi du marché), il envisagera sereinement un plan pour larguer son fournisseur français, celui qui s'était saigné pour réduire sa marge en l'échange d'une promesse orale d'autres commandes pour l'année. Car, loi du marché oblige, en Chine c'est deux fois moins cher. Même si les certifications de conformité des marchandises sont bidon, on s'en arrangera. Le lendemain, après avoir vu un reportage à la télévision, il fera part de son indignation face au scandale de la concurrence déloyale pratiquée par la Chine et aux importations de marchandises dangereuses. (Ces exemples sont parfaitement réels et vécus). Dans le cas de notre hypocrite de droite salarié, ça peut être parfois aussi choquant. En tant que parfait approbateur théorique de la loi de la compétitivité, tout en méprisant ceux qui ont moins réussi il fustigera les fainéants qui veulent rentrer chez eux le soir avant l'heure traditionnelle du diner, justifiant qu'il est arrivé là où il est à force d'efforts, mais en oubliant de préciser qu'il arrive au boulot chaque matin après 10 heures et qu'il s'absente durant trois heures durant la pause de midi. (Le tout est d'être en synchronisation avec les heures de présence du "chef"). Il est béat d'admiration devant ceux qui "créent le besoin" en escroquant une population de pigeons bernés ou en quête de dépenses inutiles, mais traite les artisants de voleurs, ces rustres qui n'ont pas son rang social. Enfin, si jamais il vient brutalement à se retrouver au chômage, lui qui dénigrait toute forme de protection sociale réservée aux fainéants, il serait le premier à s'indigner si l'allocation ne lui permettait pas de maintenir 100% de son train de vie durant cet imprévu. Vous l'avez compris, quand il s'agit de ses intérêts personnels, l'hypocrite de la justice sociale sait brillamment adapter ses principes. Cela ne lui cause aucun problème de fierté.




Aurais-je été si dur que cela envers notre hypocrite de droite ? Ne croyez pas que je serai plus indulgent avec l'hypocrite de gauche. En effet parmi la gauche on compte aussi de nombreux hypocrites de la justice sociale. Je pense qu'ils sont moins caricaturaux et plus banals, mais plus nombreux, donc on dira que ça s'équilibre pour que tout le monde soit content. Comme je l'ai déjà écrit, les hypocrites de la justice sociale ne peuvent pas être extrémistes. L'extrémisme oblige à trop d'implication, ce qui rendrait la situation ridicule. (Mais après tout, le ridicule existe). On considèrera donc ici principalement le socialiste qui ne sait plus vraiment ce qu'est le socialisme. Plus qu'un capitaliste américain des années 50, celui que j'appellerai ici notre naif de la justice sociale n'a qu'un mot à la bouche: "Pouvoir d'achat". On ne parle plus d'équité ni d'égalité ni de justice sociale; non non. A gauche comme à droite on ne parle plus que de "pouvoir d'achat". Jusqu'à ces dernières semaines, on n'avait pas l'impression qu'il était possible de s'inquiéter du pouvoir de travailler. C'est seulement très récemment qu'on commence à se réveiller. Car, comme dirait un enfant de cinq ans, pour pouvoir acheter il faut avoir un travail. Mais les naifs de la justice sociale n'ont peut-être pas encore tous compris: Tous contre le protectionnisme (ou faussement pour), il pestent pourtant contre les délocalisations (surtout si il les subissent personnellement). Pour rien ils ne lâcheraient un avantage social, et ils hurlent les premiers dès que pointe la moindre rumeur de réforme dans ce sens. Pourtant ils seraient les premiers à manifester si le prix des marchandises importées habituellement depuis les pays à faible cout de main d'oeuvre venait à augmenter. Car la loi universelle du marché dit que le pouvoir d'achat doit continuer à augmenter sans limites. En effet la particularité de nos hypocrites de gauche est qu'ils sont imbibés des principes de la société de consommation, ceux-là même qu'ils pourfendent avec ardeur dès que la moindre discussion pointe à l'horizon. Tout comme n'importe quel "bourgeois", sous réserve qu'ils en aient autant les moyens ils gaspillent allègrement, balancent la nourriture en surplus en fin de repas après s'être indignés contre la faim dans le monde, entassent dans les bennes à ordures leur matériel démodé qui sera remplacé par les nouveaux objets "fashion" qui leur accorderont la reconnaissance sociale, et qui par la même occasion seront fabriqués là où on gagne 3 euros par jour. Cela ne les empêchera pas de se poser en tant que défenseurs de l'écologie, jusqu'alors chasse gardée de la gauche en France. (Cela change seulement maintenant car l'écologie devient un business). Pionniers de la lutte pour les conditions de travail, ils rêvent de travailler dans des entreprises nationalisées mais n'achèteraient jamais rien de ce qui s'y fabriquerait, question de pouvoir d'achat ! Plus généralement, ils attendent tout de l'état, et pourquoi pas un salaire garanti à vie, même sans travail, afin d'entretenir la consommation de produits importés depuis les pays où on pratique le capitalisme le plus sauvage. Là est le secret de la reprise, à la façon socialisme "tendance", que nous sommes trop bêtes pour comprendre ! Vivre au crochet de l'état et des populations esclaves des pays à faible cout de main d'oeuvre, tout ceci enrobé dans un parfum de justice sociale. Bien sûr, pour rétablir l'équilibre de la pensée, de temps à autre lors d'une discussion entre amis et pour montrer qu'ils sont de gauche, ils condamneront l'exploitation de l'homme par l'homme dans les pays "émergents", petite parenthèse dans leur course au pouvoir d'achat personnel. Mais surtout ne croyez pas que les hypocrites de gauche se résigneront à envisager qu'un jour le pouvoir d'achat puisse stagner. Quand son ascension est freinée on en vient déjà à dire qu'il baisse, alors n'y pensez pas ! Remarquons au passage que ce n'est pas le pouvoir d'achat à salaire constant qui baisse en ce moment, mais le niveau de vie effectif lié à la précarité de l'emploi et au manque de logements disponibles dans les zones d'emploi. C'est plus grave mais c'est autre chose. Encore une manipulation fallacieuse de nos hypocrites de la justice sociale. Et pourtant même chez ceux à gauche qui croient avoir compris en manifestant au son du "Arrêt des licenciements", on retrouvera les mêmes dégonflés qui ne seraient pas capables d'assumer les quelques restrictions nécessaires à l'application de leur propre programme. C'est tellement plus rassurant de s'imaginer que la poignée de milliardaires présents dans le pays ont de quoi subventionner la France entière par une redistribution salutaire. Conte de fées qui les aide à s'endormir mieux... Enfin, pour terminer sur un type particulier d'hypocrite de gauche, on pourra s'arrêter sur le cas de certains fonctionnaires dont j'ai connu quelques exemples: Couple bien installé, propriétaire d'une maison en région parisienne, tous deux fonctionnaires, dont l'un des deux parle chaque semaine de ce qu'il va acheter de nouveau, pour se plaindre ensuite continuellement de son salaire sous évalué à cause de son statut dramatique de petit fonctionnaire. Lorsqu'on arrive à lui extorquer la valeur exacte de son salaire (qu'il a peut-être sous évaluée), on s'aperçoit qu'on gagne moins que lui alors qu'on se croyait bien payé ! Quelques minutes plus tard, tel un véritable bourgeois, il repart dans ses comparatifs sur les dernières voitures sorties et les gadgets à la mode, en faisant le difficile en plus ! (Ne sont dignes de lui que les produits d'une compétitivité qualité/prix maximale, bien entendu, donc issus de la course à la productivité). Mais que feraient tous ces pauvres gens si un véritable régime socialiste arrivait au pouvoir un jour ? J'ai presque envie de les plaindre !






Aussi, avant de clore, et pour démontrer à quel point c'est agaçant de discuter avec de gens qui n'ont pas le courage de leurs opinions, je tiens à illustrer mes descriptifs par cette petite histoire (enchainement de dialogues au cours des semaines) absolument vécue et réelle, mettant en scène en tant que personnages principaux un chef de PME et son ami, un professeur de l'enseignement public travaillant occasionnellement pour lui. (Déclaré ?) Il s'agit ici vraiment de l'étude de spécimens caractéristiques. Un véritable cas d'école.

Afin de simplifier l'histoire nous considèrerons que l'entrepreneur s'appelle "JM" et que le professeur de l'enseignement public s'appelle "H". Une fois par semaine, H a un jour de libre car son ancienneté lui permet de faire aménager les emplois du temps de son lycée prioritairement en fonction de ses contraintes personnelles. (Et oui, l'enseignement public c'est comme l'armée: les bizuths de base sont là pour en baver et les autres pour se la couler douce). Ainsi H peut venir travailler chez JM chaque vendredi en tant que prestataire en bureau d'études. Apparemment c'est merveilleux pour lui. Cette découverte du monde de la libre entreprise le stimule incroyablement, d'après ce qu'il dit. Comme on dit trivialement il est "complètement à fond" quand il s'agit d'en parler. Il en vient même à tempérer les éventuelles critiques qu'il pourrait percevoir de la part des salariés de l'entreprise, particulièrement en ce qui concerne les licenciements à répétition qui y ont eu lieu: Plus de 4 personnes au total licenciées pour faute, pour un effectif total de 10 personnes, sans contexte de crise particulier puisque notre histoire se passe avant 2008. Et oui, vous l'avez deviné, notre fonctionnaire qui s'affirme avec fierté comme un homme de gauche s'affiche aussi comme un homme averti à l'écoute des contraintes du marché. A toute remarque désobligeante à propos de cette incohérence il répondrait que dans le privé on est bien payé et qu'en contrepartie il faut s'attendre à des inconvénients. Si on n'est pas assez bon, il ne fallait pas y venir. (Doit-on donc se rabattre dans la fonction publique quand on est mauvais, aurai-je envie de demander ?) D'ailleurs, à chaque fois que la discussion repart sur ce sujet lors des gais repas de midi en équipe, H et JM sont parfaitement en phase. C'est l'harmonie totale ! En de telles situations H met en veilleuse un court instant ses discours altermondialistes, mais pour peu de temps. En effet, si il sait cueillir JM au bond à l'occasion d'une petite remarque bien placée, nos deux grands amis pourront s'attarder tout de même sur les graves problèmes sociaux et écologiques à l'échelle mondiale. Mais à la fin du repas, le travail reprend et on arrête de délirer: on étudie comment faire passer un maximum de la production actuelle en Chine ou en Tunisie. Il ne faut pas rigoler tout de même ! Les petits égarements à la philosophie de comptoir, ça va un moment !

Mais il y a d'autres situation où nos intervenants ont beaucoup plus de mal à s'entendre. Ca peut démarrer avec l'impression d'une pseudo-entente, sous la forme de cette obsession néo-révolutionnaire souvent chère aux français de base: "Il faut tout péter". Pourquoi ? A cause des politiciens qui ne travaillent pas correctement, bien sûr, mais ce qui est drôle est que nos deux révolutionnaires en herbe ne l'entendent pas du tout de la même façon. H rêve d'un monde où tous les salariés sont fonctionnaires et où l'égalitarisme est la doctrine maitresse, alors que JM révèle son ignorance crasse en prétextant qu'il faut se révolter comme en 68 afin de se débarrasser de tous les "improductifs" (sic) ainsi que de toutes les barrières étatiques qui ruinent l'économie. (Comme quoi c'est probablement vrai que les exploiteurs d'aujourd'hui sont les hippies d'hier...). Et l'inévitable conflit survient enfin lorsque JM vient à affirmer haut et fort qu'il y a trop de fonctionnaires dans le pays et qu'on n'en supprime pas encore assez. A ce moment la situation est grave, car on ne refait plus gratuitement le monde mais on en vient à parler de ce qui touche personnellement. C'est une déclaration de guerre: JM entre dans la bataille contre les prélèvements fiscaux dont il est la cible et visant à entretenir les fonctionnaires qu'il considère comme inutiles, et H voit en cette allusion une attaque personnelle. Une chose plus drôle est l'argument qui vient en réponse. On pourrait s'attendre à quelque chose comme: les dangers d'une société sans services publics de qualité, sans enseignement équitablement dispensé, sans justice sociale. Mais il n'en est rien. Le seul argument qui vient en réponse (et qui fait à juste titre éclater de rire les autres personnes présentes) est: "Fais comme ça et tu verras quel sera le nombre de chômeurs en France ! Tu n'y as pas pensé à ça, hein ?". C'est donc en réalité plutôt triste de voir à quel point H considère que ses congénères sont utiles au pays. Accordons nous même de dire que c'est consternant. Il est indiscutable qu'avec un tel interlocuteur, JM aussi ignorant qu'il soit ne pouvait que remporter la bataille.

Croyez vous que l'attitude de nos combattants pour la justice changera à partir de ce jour ? Sûrement pas. Déjà, un quart d'heure plus tard, c'est la grande réconciliation quand il s'agit de se plaindre de l'assistante de JM... La question de l'assistante de JM est un sujet qui mérite qu'on s'y attarde lors de quelques lignes. Dans une vie professionnelle antérieure, JM et son assistante avaient déjà eu l'occasion de travailler ensemble, mais salariés tous deux. Lorsque JM avait monté son affaire, il avait immédiatement pensé à elle. Fort contente de saisir cette opportunité de travailler avec celui qui était presque devenu un "copain" pour elle, celle-ci avait sauté sur l'occasion. Sans rechigner à la tâche et sans lésiner sur son implication, elle avait participé au démarrage de la "boite" sans compter ses heures ni émettre la moindre protestation à chaque fois qu'elle était retenue (pratiquement tous les jours) jusque deux heures après la fin de son horaire légal. Mais tout avait changé le jour où elle avait demandé de pouvoir partir à 15 heures afin de visiter sa mère à l'hôpital sortant d'une opération du coeur. Une demie journée lui fut décomptée, car attention, même quand on est JM le "copain" on ne commence pas à jouer à ce jeu là avec les employés, sinon ils se croiraient tout permis, comme c'est bien connu ! Suite au récit de cette histoire H approuve d'ailleurs pleinement JM vis à vis des autres salariés, qu'on se le dise. Même combat et même position quand il s'agit d'approuver qu'il est hors de question d'attribuer des écrans LCD aux "filles" (*) car sinon, on ne sait pas où ça va s'arrêter ! Aussi il s'étonne, tout comme JM, que la dite assistante montre quelque relâchement (entendons par là: qu'elle travaille tel qu'il l'a été défini dans son contrat) et comprend pleinement le mécontentement de JM. C'est indiscutable, quels que soient les faits et arguments éventuels apportés par les autres salariés, H rétorquera que la vilaine assistante se comporte de façon ingrate envers son employeur, étant donné les conditions financières merveilleuses dont elle profite dans l'entreprise. Car selon H, c'est bien connu, et nous l'avons déjà dit, dans le privé on gagne beaucoup...

(*) Les "filles" : Ce mot prononcé par JM désigne l'ensemble du personnel administratif, autrement dit ceux dont il peut se débarrasser facilement du jour au lendemain car facilement remplaçables. En l'occurrence ce sont tous des filles, ce qui ne manque pas de lui donner des arguments à caractère misogyne dès le moindre problème.

Que se passe-t-il la semaine suivante ? H raconte, lors d'une discussion avec les salariés cadres (ingénieurs), qu'il a heureusement cette activité supplémentaire car si il devait se contenter de son salaire d'enseignant il n'irait pas loin, étant donné le prix des légumes frais et des vacances au ski. Après un quart d'heure de questionnement insistant, H accepte enfin de dévoiler quel est l'ensemble de ses revenus en tant qu'enseignant: c'est le salaire d'un ingénieur ayant 5 ans d'expérience, soit 60% de plus que celui de l'assistante prétendument si bien payée. Je suppose donc que si ce salaire est jugé insuffisant il vraiment faut voir la vie en grand pour être un hypocrite de la justice sociale, même quand on est de gauche !




On peut sûrement trouver le même type d'hypocrites, de gauche comme de droite, lorsqu'on aborde d'autres sujets de société que la politique économique. Par exemple, quand il est question d'écologie ou de justice il y a aussi de quoi disserter. Mais ce sera pour une autre fois...




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