UN REVOLUTIONNAIRE VIENDRAIT NOUS SAUVER?
QUEL FUTUR NOUS ATTENDRAIT?

En 2010 j'avais titré cette page: "Un facteur révolutionnaire viendrait nous sauver?"
Mais à présent tout le monde sait que le facteur est oublié,
ce qui ne veut pas dire qu'il n'ait pas de digne successeur dans un parti de mouvance proche:
le grand orateur Mélanchon.

Il semble toujours que peu de partis saisissent l'occasion de proposer des alternatives significatives à ce qui se fait aujourd'hui... à part les plus extrêmes. Jusqu'ici on était là en présence d'un argument pour montrer que le pro-mondialisme sans limites était la seule voie réaliste et envisageable par tout parti raisonnable, en conformité avec les voeux d'allégeance faits à l'UE. Cependant, à force de montrer que celui qui semble proposer ce qu'on espère est un diable, on finit par rendre ce diable sympathique. Jusqu'à quel point est-on prêt à courrir ce risque?

Essayons donc d'imaginer ce cas de figure. Pour cela, mettons en scène des interviews virtuelles complètes, en supposant que le candidat vient d'être fraichement élu et expose en détails le programme qu'il va mettre en application.





PAS DE FACTEUR REVOLUTIONNAIRE NI D'ARLETTE AU POUVOIR... MAIS UN MELANCHON


Encore aux oubliettes il y a quelques temps, les partis d'extrême gauche d'abord puis les communistes "traditionnels" ont saisi la balle au bond face à l'impuissance des pays européens à protéger leur indépendance et leurs emplois. On ne sait pas quelle sera leur popularité si les choses continuent de se dégrader à cette vitesse. Imaginons donc que nous sommes en 2017 ou 5 ans plus tard encore, et que Jean-Luc Mélanchon vient d'être élu président de la République. Il nous accorde cette interview "virtuelle":

Q: Monsieur Mélanchon, dès demain quelles seront les mesures de votre programme que vous appliquerez en priorité? Par quoi allez vous commencer?

JL.M: Comme vous le savez, à l'heure d'aujourd'hui où plus de 50% de la population française est au chômage, la priorité est leur réintégration immédiate et planifiée par l'Etat au sein des entreprises du pays.

Q: Ne craignez vous pas que les dernières entreprises non délocalisées du pays ayant subsisté jusqu'alors ne puissent supporter cette charge considérable qui leur sera imposée?

JL.M: Il faut arrêter de raisonner avec cette logique libéraliste. Le but n'est pas le profit des entreprises du pays mais le droit à l'emploi. Aussi toute entreprise ne pouvant s'acquitter de ce devoir aura la possibilité de se voir nationalisée sans frais, de sorte à ce que l'Etat reprenne sainement son rôle de protecteur.

Q: Ne serait-ce pas là de la nationalisation forcée sous couvert d'un choix sans issue?

JL.M: Ceci n'est pas un débat prioritaire. Les profits des capitalistes ne sont pas notre préoccupation. La garantie du tout nationalisé est la garantie du droit à chacun à un salaire satisfaisant et à des avantages sociaux incomparables.

Q: Comment envisagez vous de maintenir la compétitivité de ces entreprises nationalisées par rapport à celles qui sont maintenant délocalisées depuis longtemps mais continuent d'exporter vers la France?

JL.M: La compétitivité est un critère d'évaluation capitaliste qui n'est pas une fin en soi. Par ailleurs, nous éspérons que notre modèle sera rapidement repris et imité dans le monde, de sorte à ce que nous n'ayons pas besoin de nous préoccuper de comptétitivité ni de régulation.

Q: Sans protectionnisme?

JL.M: Sans protectionnisme au sens où vous l'entendez. Nous allons travailler pour... (suite sans actions concrètes)

Q: Si rapidement que çà? Même dans cette hypothèse, comment expliquez vous que de nombreux français disent vous avoir élu dans le but d'une augmentation de leur pouvoir d'achat? Comment prévoyez vous de gérer l'augmentation des coûts de fabrication, par exemple?

JL.M: Il n'y aura rien à gérer. Les salaires seront réévalués périodiquement.

Q: Ne craignez vous pas que ces recompensations successives ne se mordent la queue et qu'au final on assiste à une inflation galopante et à une dévaluation gravissime de notre Euro Alternatif, alors que vous proposiez de rester en zone Euro classique mais que l'UE nous en fait sortir de force? Ne craignez vous pas que cela finisse par ruiner toute l'économie du pays et même l'Etat?

JL.M: La notion d'Etat ruiné est un principe capitaliste. L'Etat a le pouvoir de créer la monnaie et de s'affranchir de la soumission à des banques privées. Seule la banque d'Etat aura force de loi et dictera ses conditions. De plus, la stabilisation de la situation sera facilitée par la régulation des prix.

Q: Il semble qu'en fait vous repreniez exactement l'ancien modèle soviétique. Comment procèderez vous pour obtenir de meilleurs résultats que vos prédécesseurs historiques? On sait en effet aujourd'hui qu'à l'époque de l'Union Soviétique le niveau de vie des foyers russes moyens était très bas, la vie plutôt dure, laissant une place inexistante aux loisirs et au confort le plus élémentaire. On sait finalement que le système s'était maintenu longtemps en place parce-qu'il s'appuyait sur une classe sociale minoritaire officiellement privilégiée, disposant d'avantages en nature et des droits d'achat exclusifs, bien au delà de la moyenne. La production des biens n'a jamais cessé d'être déficitaire, suite à l'écart entre les prix effectifs régulés et les coûts réels (financiers ou en ressources) de production. Il était même fréquent de rencontrer des pénuries alimentaires, même après les années 70!

JL.M: Il s'agit d'un mauvais exemple car nous ne projetons pas de maintenir notre pouvoir par la mise en place d'une caste privilégiée, ce qui serait tout à fait contraire à nos idéaux, rappelons le. Nous ne sommes pas des capitalistes. L'URSS est un mauvais exemple car elle a trahi les idéaux du vrai socialisme.

Q: Néanmoins serez vous sûr que les mêmes problèmes de pénurie ne se poseront pas? Si la classe privilégiée des officiels et des protégés de l'URSS n'avait pas existé, la pénurie aurait pourtant bel et bien toujours existé car on ne peut concevoir qu'une minorité de la population ait pu réussir à monopoliser à ce point toutes les ressources de la nation, aussi inégalitaire soit-elle !

JL.M: Ici on touche à la responsabilité collective. Bien sûr à présent il revient à chacun, par le choix qu'il a fait, de s'impliquer dans notre aventure commune pour la justice sociale. Si le peuple ne joue pas le jeu, nous connaitrons des difficultés et seront alors contraints de trouver des solutions.

Q: Par exemple ? Des sanctions pour les resquilleurs? Des sanctions pour les chômeurs qui n'acceptent pas le travail que leur propose l'Etat ? C'est ce qu'on appliquait aussi en URSS.

JL.M: Il est trop tôt pour débattre de ces éventuels problèmes. Je fais d'ailleurs confiance aux français et je pense que nous n'en arriverons pas là.

Q: Finalement n'est-ce pas un aveu comme quoi le maintien d'un niveau de productivité défini soit nécessaire parmi les travailleurs afin de garantir un pouvoir d'achat réel à la population, plus qu'un salaire et des prix régulés?

JL.M: Le pouvoir d'achat, qui est à l'origine une expression issue du capitalisme, ne doit pas être le sujet principal de notre débat.

Q: C'est pourtant celui de la plupart de vos électeurs, dont certains commencent à s'inquiéter d'une possibilité de pénurie.

JL.M: Quoiqu'il en soit, nous avons d'autres priorités: l'égalité, la protection sociale généralisée pour tous les frais, mêmes autres que médicaux, et enfin les transports en commun gratuits. Le pouvoir d'achat sera alors une donnée secondaire devenue moins nécessaire à une vie plus juste et moins précaire. Il ne sera plus nécessaire de dépenser des sommes considérables pour acheter un véhicule devenu inutile. Il se peut même que la régulation des prix de l'électricité et de l'eau réduisent le besoin en salaire net à une somme beaucoup plus basse que celle nécessaire actuellement.

Q: Je sens comme une rupture avec vos promesses de campagne...

JL.M: Sur la forme mais pas sur le fond. Vous comprenez bien qu'il faut un peu simplifier les choses en campagne, tout de même!

Q: Changeons donc de sujet. Hier déjà les 2 millions de sans papiers dont vous avez ordonné la régularisation systématique la semaine dernière étaient en train de manifester car ils peinent à trouver un logement, en dépit de la loi sur le logement opposable. Même après réquisition de tous les logements non habités, la pénurie est encore sérieuse. Que comptez vous faire pour résoudre ce problème?

JL.M: Je pense que certains propriétaires de mauvaise foi ont encore dissimulé la situation réelle d'occupation de certains de leurs logements. Par exemple je crois qu'il y a beaucoup de résidences secondaires qui ne sont occupées que peu de temps dans l'année. C'est tout à fait scandaleux de penser que cette situation perdure alors que des gens sont en attente de logements. C'est pourquoi nous avons prévu de recourir à des contrôles plus poussés et à des sanctions pour les contrevenants.

Q: Comme le prétend monsieur X de l'opposition, il semblerait qu'en continuant sur cette voie vous soyez contraints de recourir à l'instauration des logements communautaires, telle qu'elle fut appliquée par les bolcheviks dans les anciens appartements bourgeois. Qu'en est-il?

JL.M: Monsieur X tente encore une fois d'agiter l'épouvantail de l'URSS pour discréditer notre action. Ca ne m'étonne pas de lui. Sachez que l'aménagement des appartements communautaires ne se fera pas de façon sauvage comme en URSS. Leur transformation répondra à des normes bien précises afin que les habitants puissent y résider avec le confort nécessaire. Dans les rares cas où le propriétaire du logement n'aura pas les moyens d'effectuer les travaux requis, et sous réserve qu'il en ait fourni les preuves, l'Etat financera les dits travaux.

Q: Le propriétaire aura-t-il toujours le droit d'habiter dans l'appartement ainsi transformé qu'il possède, en cohabitation avec les autres résidents?

JL.M: S'il ne possède pas d'autre logement, bien entendu. Il aura droit a la même surface d'habitation que les autres foyers, ainsi qu'à l'accès aux parties communes. En général on peut espérer qu'il y ait au moins deux salles de bains à partager, étant donné que les logements visés sont statistiquement bien équipés. Il n'y aura donc pas de problème.

Q: Le propriétaire aura-t-il la possibilité de demander le paiement d'un loyer modéré aux habitants?

JL.M: Bien sûr que non. Et si il s'avère que des propriétaires malhonnêtes sont surpris à facturer illégalement des loyers clandestins, ou à exercer des pressions afin de favoriser certains habitants par rapport à d'autres, le logement sera saisi complètement. Il est bien entendu normal que les plus riches participent de façon conséquente à la résolution de la crise du logement, et non qu'ils profitent de la situation pour s'enrichir. Il ne saurait en être autrement.

Q: A partir de quand une propriété quelconque peut-elle être considérée comme un logement réquisitionnable?

JL.M: Dès qu'il s'agit d'autre chose qu'une cabane à jardin, bien sûr. A partir du moment où il s'agit d'une habitation qui n'est pas utilisée cent pour cent du temps.

Q: Pendant combien de temps cette situation temporaire devra-t-elle perdurer en attendant l'achèvement du programme national de construction de logements sociaux?

JL.M: Sachez que même si le programme est prioritaire et bien engagé, ce recours supplémentaire sera toujours nécessaire. Car notre pays, apparemment vu dans le monde comme le modèle social de référence, rencontre actuellement un fort succès auprès des arrivants du monde entier. Bientôt nous pourrons être fiers d'avoir été les pionniers à sortir du modèle traditionnel sécuritaire et égoiste.

Q: Revenons donc sur un fait divers de ce matin même. En effet plusieurs quartiers résidentiels plutôt huppés autour de Paris ont été la cible d'attaques et de pillages par des bandes organisées et très nombreuses. Après le dernier bilan on déplore déjà près de cent morts parmi les résidents et de nombreuses dégradations. Monsieur X dit qu'aucun détachement de police ni de CRS ne s'est rendu sur les lieux, et il prétend que des ordres ont été donnés dans ce sens. En d'autres mots il vous accuse de cautionner ces actes. Qu'en est-il réellement?

JL.M: Monsieur X, comme d'habitude, tient particulièrement à s'attacher à des problèmes insignifiants au lieu de se préoccuper des vrais sujets. Pour ma part je n'ai soudoyé aucune bande et ne suis pas l'instigateur de ce mouvement de foule. Je pense que tous les capitalistes sont en train de récolter ce qu'ils ont semé, et aujourd'hui c'est à eux-mêmes qu'ils doivent s'en prendre.

Q: Il s'agit tout de même ici de violences aveugles touchant des familles, des enfants...

JL.M: Et ne pensez vous pas que l'exploitation de l'homme par l'homme par les capitalistes sur cette Terre touche aussi des familles et des enfants? D'ailleurs vous m'excuserez mais j'ai encore beaucoup de travail. Nous avons encore beaucoup de pain sur la planche...




FAITES VOS PRONOSTICS !


Inutile de dire qu'après cette interview "virtuelle" les médias indépendants sont soigneusement mis sous contrôle, les accès aux sites internet sont filtrés et les forums sont étroitement surveillés afin de remonter toutes les pistes pouvant mener à des réseaux d'opposition jugés dangereux. D'autre part, afin d'éviter d'avoir à gérer l'intégrisme religieux importé en marchant sur des oeufs, toutes les associations religieuses et les églises sont persécutées, et avant tout l'Eglise Catholique, premièrement parce-que ce sera beaucoup plus facile, et deuxièmement pour se justifier en tant que républicain neutre. En connaissance de cela il ne vous reste plus qu'à choisir l'un des trois scénarios possibles pour les prochains scrutins à venir:

1)Continuer à voter pour les partis "standards" (PS, UMP, MODEM) aussi grands par les voix qu'ils ramassent que par le vide de leurs actions, une fois que les paroles sont terminées, et qui se querellent périodiquement à propos de sujets secondaires et de non-évènements. Dans dix ans, cela mènera au point deux, irrémediablement.

2)Accélerer la catastrophe en piquant sa crise et en votant de suite pour des fous furieux similaires à celui de notre "interview virtuelle", avec les conséquences que l'on suppose donc. Est-ce un bon plan?

3)Ne pas voter conventionnellement, autrement dit "pas utile" selon le jargon des grands partis, tout en votant pour des gens mentalement équilibrés, que sais-je: Des "souverainistes"(*). Des écologistes raisonnables me direz vous? Mais en France ils ne sont qu'une filiale du PS (aussi, exit les altermondialistes qui ne visent que notre extermination et se rapprochent beaucoup de notre candidat révolutionnaire). Bref, ajustez selon vos tendances politiques... Il y a encore de quoi vous y retrouver... Un peu d'efforts!

(*) "Souverainiste" ne signifie pas royaliste, mais partisant de l'autonomie des nations et du pouvoir indépendant de l'Etat.

Aussi j'espère sincèrement qu'enfin de plus en plus de monde se rendra à l'évidence et que nos élites dirigeantes de l'ombre cesseront de faire, dans leur intérêt strictement personnel, le jeu des extrémismes qu'ils prétendent combattre (et qu'on ne considère, pour certains, même pas en tant que tels), en insistant d'ailleurs surtout là où il n'y en a pas. Souhaitons nous bonne chance!




"En général, de nos jours, le système protecteur est conservateur, tandis que le système du libre-échange est destructeur. Il dissout les anciennes nationalités et pousse à l'extrême l'antagonisme entre la bourgeoisie et le prolétariat. En un mot, le système de la liberté commerciale hâte la révolution sociale.
C'est seulement dans ce sens révolutionnaire, Messieurs, que je vote en faveur du libre-échange."

Karl Marx





LA VITRINE D'UN MAGASIN CHIC A PARIS

Lorsque Patrick Arthus a écrit "Le capitalisme est en train de s'autodétruire", il ne pensait peut-être pas à des exemples aussi primaires et non économiques. Et pourtant il y a des petits exemples de tous les jours qui montrent comment la société occidentale n'a pas besoin de tiers pour s'auto-détruire. C'est tellement "in", de nos jours, d'être un destructeur, à tous niveaux de l'échelle, même un casseur des banlieues...






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